Un roman de Stephen King - 22/11/63: trois chiffres qui font date

Publié le 26 Septembre 2014

Un billet made by Pierre Niocel, qui fait sa rentrée sur T'as vu ma plume! Fan de Stephen King, je suis loin d'avoir lu tous ses bouquins mais celui-là me tente bien...

J'avais dans un précédent billet évoqué le traitement littéraire des "grands moments" historiques par Stefan Zweig et notamment regretté l'importance excessive donnée à un instant particulier au détriment du contexte dans lequel il se produit.

Cherchant un ouvrage abordant l'Histoire sous un autre angle, j'ai lu cet été "22/11/63" de Stephen King. Dans ce volumineux ouvrage de 740 pages, il est question de revenir, au moyen d'un tunnel spatio-temporel, en 1958.

C'est ainsi que le héros, un certain Jake Epping, se laisse suggérer l'idée de revenir en 1958 dans le but, 5 ans après, d'éviter l'assassinat du président Kennedy en désarmant Lee Harvey Oswald. Ce faisant, l'ensemble des crises (à commencer par la guerre du Vietnam) déclenchées par les successeurs de Kennedy seraient potentiellement évitables. Commence alors un récit passionnant, au carrefour du thriller et du roman historique, où revit l'Amérique d'il y a 50 ans, et au cours duquel Jake Epping mène une très longue quête en devant composer avec de multiples événements imprévus. Le travail de documentation et de recherche effectué par King est remarquable, sans pour autant faire basculer son roman dans le registre du livre d'histoire. Les événements historiques et culturels des années Kennedy se succèdent en toile de fond des pérégrinations d'un héros immergé dans un pays qui lui apparaît soudainement bien moins familier. Il en résulte un ouvrage très agréable à lire malgré sa longueur.

Un roman de Stephen King - 22/11/63: trois chiffres qui font date

Outre la question du dénouement final, l'intérêt de ce roman réside dans la réflexion sur l'imbrication des événements et sur la question de leur transposabilité dans le temps.

A ces problématiques, King répond en supposant qu'un contexte donné à l'instant t débouchera nécessairement sur une situation donnée à l'instant t+1, peu importe le nombre de "rembobinages". La meilleure illustration de cette théorie est la reproduction fidèle, au fil des pages, des résultats sportifs relevés par Epping avant d'entreprendre son voyage dans le temps. Dans le même ordre d'idées, la vie de Lee Harvey Oswald se déroule exactement de la même manière au cours du roman que dans les multiples rapports et biographies le concernant.

Toutefois, cette idée d'immuabilité du passé est contrebalancée par la conception des voyages dans le temps qu'a choisi de retenir King. En effet, ceux-ci ne se feraient pas, selon lui, au moyen de "trous de vers" que l'on pourrait indéfiniment emprunter afin de contempler après coup les conséquence de nos actions passées avant d'éventuellement repartir pour rectifier certaines erreurs inattendues. Revenir dans le passé ne poserait aucun problème ; en revanche, le "retour vers le futur" et l'importation des conséquences des actes que l'on aurait commis durant une visite dans le passé seraient bien plus complexes...

C'est donc à une réflexion multiple que King invite ses lecteurs: sur des regrets éventuels quant à leurs actions, sur la nostalgie d'un monde passé et trop souvent idéalisé, ou encore sur le rôle de l'homme vis-à-vis de grandes questions scientifiques qu'il imagine maîtriser.

En faisant intevenir l'ensemble de ces notions dans un univers mettant en scène des personnages aussi divers que les hôteliers du Maine, les bookmakers texans ou "JFK" en personne, King a en tout cas signé l'un des grands classiques de l'uchronie, que l'on ne saurait trop recommander aux amateurs du genre – j'en suis.

Rédigé par t-as-vu-ma-plume

Publié dans #Cercles de culture

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