Un croissant de Lune pour vous mettre en appétit

Publié le 31 Janvier 2011

La lune est une menteuse, et la veuve noire est une vicieuse

 

Phasestoilearaigneegabarit

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Je n’ai pas choisi les passages les plus réjouissants, mais ceux qui, d’après deux de mes premiers lecteurs, représentaient quelque chose de particulier.

Et puis des passages de morceaux de piano pour accompagner ces extraits dépressifs. Comme ça l'effet est complet mouahaha.

 

Le premier extrait concerne la visite de mon héros policier, Christophe, à une victime hospitalisée. Le jeune Ludovic subit une sorte d’overdose.

 

Il fallait voir ce qu’avait fait cette drogue à Ludovic. L’entendre ne suffisait pas pour se rendre compte. S’il ne savait pas qu’il avait dix-sept ans, Christophe n’aurait jamais pu le deviner. Les traits anguleux, le visage creusé, les yeux cernés de cercles violacés par l’épuisement de la lutte contre ses assaillants imaginaires. Ses joues avaient perdu toute couleur. Et ses yeux exprimaient une grande terreur. L’ensemble de ses muscles se contractait en permanence, et ses bras et jambes battaient l’air pour chasser les dévorantes. A intervalles réguliers il se cambrait en poussant un hurlement perçant, sentant des monstres grouiller dans son ventre. Ses cheveux trempés de sueur étaient plaqués contre son front, que sa mère caressait. Son corps maigre donnait l’impression qu’il n’avait pas mangé depuis plusieurs jours. Pourtant l’agression n’avait eu lieu que la veille dans l’après midi.

Christophe ne se souvint pas d’avoir descendu les escaliers. Il comprenait l’attitude de Julien et ses coéquipiers Lamougie et Raynaud. Ayant l’air constamment préoccupé, ne se joignant plus aux autres flics pour boire un coup ou manger un morceau, restant chaque jour après les autres au poste, le nez dans les photos, l’oreille au téléphone, les sourcils froncés, et les yeux et l’esprit hantés par les visages des victimes, l’affaire de La Toile avait isolé la commandant Lamougie, le capitaine Brouchot et le brigadier Raynaud de tout ce qui aurait pu les distraire de leur objectif : arrêter ce salaud avant la prochaine victime. Chaque nouveau coup de fil annonçait un échec et l’espoir déçu d’avoir un témoignage décent.

Et après cette seule visite à Ludovic, ne l’ayant pourtant vu que durant quelques secondes, sans avoir tenté de lui parler, Christophe sentait que son visage, et son expression effrayée l’habiteraient sans relâche tant qu’il n’aurait pas trouvé le meurtrier qui était en train de vider cet adolescent de toute énergie, de toute vie.

Cette affaire, il en était persuadé, allait le bouffer tout comme cette chose bouffait Ludovic.

 

Et un Au Clair de lune (Beethoven) pour égayer le tableau...

 

 

 


 

 


 

 

Le deuxième passage a inspiré l’illustration du livre et constitue le point de basculement du destin de l’héroïne :

 

Dehors il pleuvait. La cachait les étoiles, la nuit cachait la douleur. La nuit montrait un silence paisible. Un miaulement de chat monta jusqu’à la lune qui sourit. Une ombre d’arbre déploya ses membres, sombre menace qui glaçait le sang des petits enfants.

La nuit montrait seulement le silence. Le silence.

 

Un énorme fracas se fit entendre. Un bruit de verre brisé.

« - Oh ! non ! qu’est ce qui se passe encore ? s’exclama la concierge.

-          Le Silence se brisa

-          Et toi ! Qu’est ce que tu racontes ?

-          C’est un roman d’Agatha Christie.

-          N’importe quoi, c’est Le Miroir se brisa ! et moi je te demande ce qui se passe. Tu devrais aller voir !

-          Y a pas le feu, bobonne ! Répondit le vieil homme qui se leva pourtant.

Il se rendit à la fenêtre et l’ouvrit en grand. Les cordes de pluie lui battirent le visage et pénétrèrent dans le salon, humidifiant le tapis persan. Ne faisant fi des gémissements de sa femme, il regarda attentivement le sol deux mètres plus bas. Ses yeux se rétrécirent, tentant de traverser la barrière de pluie et l’ombre de la nuit.

-          C’est un miroir, dit-il à sa femme. J’ai cru voir une sorte de reflet.

La concierge avait enfilé une parka. Elle ouvrit la porte et une minute plus tard, le vieil homme la vit s’avancer dans la petite cour. Elle maugréait que le miroir avait sûrement bousillé ses géraniums. Elle s’approcha prudemment de l’objet, en fit le tour, se pencha et tâtonna de la main, sans doute à la recherche de je ne sais quoi. Le vieil homme ne comprenait pas son manège. Sa femme leva le visage vers lui, et il vit une expression paniquée sur ses traits.

-          Le miroir est intact !

-          Comment ça se fait ?

-          Comment veux-tu que je le sache ?

-          D’accord. Ramasse-le et ramène-le à l’intérieur avant d’attraper la crève. »

Puis il ferma la fenêtre en murmurant pour lui-même : « le miroir ou le silence qui se brise, c’est du pareil au même. »

 

Imaginez la pluie, fermez les yeux et lancez ce morceau (on va achever la phase de dépression...)

 


 

 


            Dehors, il pleuvait. Agatha Christie avait repris son miroir, la nuit son silence. Les gouttes de pluie s’écrasaient sur les pavés de la petite cour où était tombé le miroir. Les chats ne miaulaient plus, il pleuvait trop fort. Ce n’était un temps pour sortir personne. La lune sourit, elle était la seule reine cette nuit, la reine de ce silence, de ce vent qui guidait les arbres. Leurs ombres saluaient son passage, et dansaient en l’honneur de sa présence. Les étoiles s’étaient inclinées ce soir, elles ne pouvaient rivaliser avec sa beauté. Les chats, qui avaient finis leurs sérénades, s’endormirent sous ses rayons bienveillants, à l’abri. Car la lune était seule sous la pluie, et elle souriait, et elle riait. Elle riait du mal qui ne reprendrait que le lendemain, et auquel elle n’assisterait pas. Elle riait des ennuis, de l’heure qui tournait, de tous ces tracas qui n’étaient là que parce qu’on le voulait bien. Elle riait tellement qu’elle en pleurait, et ses larmes effaçaient le mal. La lune était seule, une fois par mois elle gouvernait le monde… pleinement.

Mais la lune était une menteuse. La Lune en C était en réalité décroissante. Et le bienfait qu’elle pensait diffuser diminuait avec elle. La lune se trompait, ses larmes n’étaient pas assez puissantes pour effacer un mal. Un mal d’apparence insignifiante mais qui, petit à petit, rongeait ce qui l’entourait.

 

La lune n’était pas seule, le mal la regardait.

 

L’appartement de Lou était dévasté. Un fauteuil était au milieu de la pièce, droit. Seul élément stable dans le temps et le vide autour de lui. Il était dos à nous, face à la fenêtre, face à la lune. Il était noir, l’ombre face à la lumière. La lune fronça les sourcils, il y avait encore une chose qu’elle n’aura pu voler, et la lune était capricieuse. Ses larmes de bienveillance se transformèrent en larmes de rage.

La pluie redoubla de violence. Ce n’était un temps pour sortir personne :

 

« - Même pas les crevettes !

Un petit ricanement suivit cette phrase étrange. Un ricanement de damnée.

Nous nous approchâmes un peu plus près du canapé. Le sommet du crâne de Lou dépassait du dos, Une main, sa main gauche, était négligemment posée sur le bras du canapé. Lou se reposait sur son soutien, le seul qui subsistait dans la pièce. Elle n’avait plus faim, es araignées l’avaient rassasiée. Elle avait dit « je t’aime » à Anthony un nombre incalculable de fois. Nous aurions pu avoir l’impression qu’elle s’était calmée, qu’elle se reposait. Mais nous nous serions trompés. Elle n’était pas calmée.

Elle n’était plus là.

Notre regard monta de ses pieds nus à sa taille maigre, de ses côtes saillantes à ses mains inertes, de sa bouche qui marmonnait à ses yeux. Les yeux n’étaient plus gris ni bleutés. Ils ne pouvaient même plus être qualifiés de yeux. C’étaient des trous béants, des gouffres, des puits dans lesquels tous les lapins blancs de l’innocence de Lou étaient tombés.

Elle reconnaissait que les araignées constituaient un excellent régime.

Je vais finir mince comme une crevette si je continue ce régime.

Oui, t’es ma petite crevette chérie.

« Comme une crevette ! »

Elle ricana encore, et encore et encore, et c’était Anthony qui ricanait.

Dehors il pleuvait de plus en plus fort. La lune pleurait de tristesse à présent de ne pouvoir rendre un peu de son insouciance à Lou, au moins pour une nuit.

« On dirait qu’elle n’est pas contente, ce soir ».

par un temps pareil on ne pouvait sortir personne.

«  Même pas les crevettes ! »

 

Je trouverai des passages plus "joyeux" une prochaine fois.

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Rédigé par t-as-vu-ma-plume.over-blog.com

Publié dans #Mes écrits : Poids Plume

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