L’art et la plume – Trisha Brown ou l’écriture dansée

Publié le 6 Janvier 2012

 

Nouveau billet de la main de Pauline Ladier, qui s’attache à nous expliquer comment se croisent les arts, comment ils interagissent, et comment ils se comprennent. Ici, à travers une écriture toute particulière qui est celle de Trisha Brown puisque c’est une écriture dansée, la danse et le dessin évoluent ensemble et forment un nouveau type de vocabulaire.

 

6-janvier--1-.png

 

Trisha Brown ; une des plus grandes figures de la danse post modern, est une des rares artistes à s’être ouvert à tous les arts, et particulièrement aux arts plastiques. Au début, la pratique du dessin est apparue comme un outil, une aide, un appui visuel, pour ses compositions chorégraphiques. « J’aimais exécuter une phrase, puis m’asseoir sur le sol et tenter de transcrire cela sur mon carnet de croquis. C’était le seul moyen que j’avais de garder trace de la chorégraphie. Je suppose que j’ai alors commencé à percevoir sur le papier des choses qui m’ont intriguée. »

En effet peu à peu, Trisha a été emporté par cet art, a su explorer les possibilités du dessin, et s’exprimer pleinement à travers lui. Il devient alors une pratique parallèle, et continuellement en lien avec sa première occupation, la danse. Trisha questionna beaucoup le dessin par rapport à l’expression corporel, le mouvement, la ligne… En débutant par de simples représentations de schémas chorégraphiques, elle en arriva à étudier la ligne du dessin, le tracé, et à travers lui, le corps. Elle commença pleinement à se tourner vers le corps en dessin, tout simplement quand la vidéo fit son apparition dans son travail, captant directement les traces de cet art éphémère qu’est la danse, de manière beaucoup plus simple qu’un dessin. En essayant, par exemple d’exprimer  la force et les possibilités de mouvance d’un buste à travers le tracé, Trisha est en perpétuelle questionnement... Comment représenter de manière visuelle une sensation, une énergie, une impulsion…? Elle fit des séries de motifs, des essais de toutes sortes, de façon régulière et rapide…  Elle voulait donner vie à la ligne, la rendre expressive, comme elle désirait voler en danse...

 

6-janvier--3-.png


Ce travail sur le dessin influença bien évidemment considérablement son travail sur la danse. Pour elle tout devenait du dessin, elle demandait désormais à ses danseurs, de prendre la position de tel objet, ou de chercher telle pause, très inhabituelle, mouvante, jusqu’à retrouver à l’intérieur, un dessin. Il lui arrivait même parfois de leur laisser quelques uns de ses travaux plastiques sous les yeux, pour qu’ils puissent directement retranscrire sa pensée, ce qu’elle attendait d’eux, en danse. Trisha voulait dessiner tous les jours, exprimant ses questionnements, allant toujours plus loin… Or elle eu des périodes de création intense comme de délaissement. Pour la danse disait-elle, elle ne pouvait s’arrêter, même si elle le voulait, car ses danseurs, les commandes, étaient toujours là, or le dessin lui, restait une pratique très intime, personnelle et spontanée, qui venait subitement et qui ne pouvait se provoquer. Trisha explora toutes sortes d’état de création, elle dessina les yeux fermés, elle dessina avec ses pieds, elle dessina les sensations vécues pendant ses chorégraphies…

Trisha n’avait jamais « souhaité »que le dessin prenne le dessus sur sa première passion ; la danse. Il était une complémentarité, un enrichissement, un autre point de vue des arts… Néanmoins elle s’interrogea mainte fois à se sujet…« Le dessin est une activité secondaire par rapport à la chorégraphie. Je ne sais si un jour l’ordre s’inversera. Si mon seul moyen d’expression avait été le dessin, je ne sais pas ce que je serais aujourd’hui. » 

Or depuis peu, Trisha a su créer une expression artistique nouvelle qui lui est propre, une expression capable de réunir ces deux arts à l’unisson. Son travail relève à présent de la performance, et peu facilement être comparé à celui de son ainé Jackson Pollock, qui, figure de proue de l’Action Painting ; composant l’expressionisme abstrait américain, plaçait sa feuille de création au sol, afin de se déplacer tout autour d’elle, se laissant guider par son pinceau. Il inventa le dripping, pratique très physique donc, qui consiste à jeter par des mouvements de pinceaux la peinture au hasard sur la toile. Trisha place également son support au sol, et, armée de fusains et de pastels aux pieds et aux mains, elle se place directement sur sa feuille, et soudain envahie par la transe, descend au sol et créée.

 

6-janvier--2-.png


Désormais, elle danse et dessine à la fois, et ce en total improvisation. Elle donne vie à des dessins qui ne sont autre que la trace, le témoignage de son acte dansé, de l’instant unique qui la saisie. La danse, et davantage encore l’improvisation ont une éphémaréité fulgurante. « L’improvisation est une force pulsionnelle. Vous ne pouvez vous accrocher à une improvisation ; vous ne pouvez la garder sous le coude ; vous ne pouvez même pas l’apporter sur scène ; vous ne pouvez pas… »

 

 

PS : A partir de maintenant et ce jusqu’à la clôture des votes, je me permettrai de vous rappeler que vous pouvez me soutenir, avec mon roman Nouvelle Lune sélectionné pour le festival de polar Plume de Glace, en me mettant une bonne note (de 1 à 5) et en mentionnant une adresse email valide. C’est ici que ça se passe. Si vous souhaitez me soutenir même sans voir lu…faites quand-même. Merci d’avance ! 

Rédigé par t-as-vu-ma-plume

Publié dans #A la croisée des arts

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article