Le Printemps en vrac

Je commence cet article par un mea culpa. Dans mon premier article sur Michel Lévy (ici), j’avais mené des premières investigations d’ordre juridique pour déterminer si, oui ou non, le titre d’une œuvre était protégé. Il m’était apparu que non.

Or, suite à un e-mail du premier intéressé, qui connait bien la question, j’ai pu constater que le Code de la propriété intellectuelle reconnaissait à l’auteur un droit de propriété sur le titre si celui-ci présente « un caractère original ».

Cet article L. 112-4. laisse au juge une liberté d’interprétation (le législateur ne se mouille pas trop), qui, selon moi, donnerait l’avantage à Michel Lévy pour l’usage du titre La Carte et le territoire (dans mon deuxième article sur Michel Lévy, j’avais pu expliquer le lien entre le titre et l’originalité du contenu).

La vérité est rétablie.

Place au printemps ! aux oiseaux qui chantent, au soleil qui veille un peu plus. Ce 7 mars, grâce aux poètes, le printemps est annoncé en avance.

(Le Printemps, Arciboldo)

Les poètes ont trouvé l’Argument avec un grand A  (annoncer avec deux semaines d'avance le retour des beaux jours) pour susciter l’intérêt des gens, et compenser l’évolution de leur « statut » d’artistes majeurs à auteurs de vers solitaires. La marraine cette année est Juliette Binoche, et ce printemps consiste en une série de démonstrations de rue par lesquelles des poètes en herbe et en fleurs viennent clamer leurs poèmes devant des passants surpris et qui, c’est le but, s’arrêtent le temps d’écouter quelques vers.

Site du printemps des poètes : http://www.printempsdespoetes.com/

La poésie c’est pour que le temps s’arrête un peu. Puis tout le monde reprend sa route. On pourrait dire que la version le plus moderne de ce genre d’actions est le flash mob.

Mais je souhaiterais surtout parler d’Histoire d’Ecrire (http://www.histoiredecrire.org/) cette association, animée en grande partie par Marien Guillé dans le pays d’Aix, a pour but de susciter la plume qui sommeille en chacun de nous, via des ateliers d’écriture, des séances de lectures etc. Vous connaissez Marien Guillé (j’en ai parlé ici), poète vagabond qui puise dans ce qui l’entoure de quoi assembler des mots et des vers.

(Le Printemps, Sisley)

Lui et son équipe de la Brigade d’Interventions Poétiques (BIP) d’Aix en Provence n’ont pas attendu que les poètes clament le retour du printemps avant l’heure pour être encore plus en avance. Ni le froid ni la tombée de la nuit ne les ont dissuadés pour clamer des textes sur le Cours Mirabeau. Prochaine séance à ne pas manquer : ce jeudi 10 mars à 19H30, devant le Monoprix.

Je commence donc cette douce période de chaleur retrouvée (dans les corps et dans les mots) pour vous offrir ce poème de Victor Hugo (je sais, le thème de cette année est « D’infinis paysages », mais je publie ce que je veux, na !)

Victor Hugo

La légende des siècles

A la fin de l'émission de France Inter Eclectik le dimanche 27 février, Jean pierre Bacri dit ce poème de Victor Hugo :

"Après la bataille"

Mon père, ce héros au sourire si doux,

Suivi d'un seul housard qu'il aimait entre tous

Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,

Parcourait à cheval, le soir d'une bataille,

Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit.

Il lui sembla dans l'ombre entendre un faible bruit.

C'était un Espagnol de l'armée en déroute

Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,

Râlant, brisé, livide, et mort plus qu'à moitié.

Et qui disait: " A boire! à boire par pitié ! "

Mon père, ému, tendit à son housard fidèle

Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,

Et dit: "Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. "

Tout à coup, au moment où le housard baissé

Se penchait vers lui, l'homme, une espèce de maure,

Saisit un pistolet qu'il étreignait encore,

Et vise au front mon père en criant: "Caramba! "

Le coup passa si près que le chapeau tomba

Et que le cheval fit un écart en arrière.

" Donne-lui tout de même à boire ", dit mon père.

parution : 1859

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[lizagrèce]

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